Consacrée dans les traités fondateurs de l’Union Européenne, la mobilité des travailleurs est une réalité qui concerne un peu moins de 3% de citoyens européens. Conçue à son origine dans le but de promouvoir un marché européen du travail, la libre circulation des travailleurs fait aujourd’hui l’objet d’une large défiance dans les opinions publiques. Souvent perçu comme un moyen de faire pression sur le marché de l’emploi ou d’encourager le dumping social, ce pilier de la construction européenne est la cible de nombreuses attaques, pour la plupart démagogiques, selon une note récente de la Fondation Robert Schuman. Son auteur, Elizabeth Morin-Chartier, eurodéputée française affiliée au PPE (Centre droit) présente en effet l’impact de la mobilité européenne sur les systèmes de sécurité sociale comme positif. Sans minimiser le phénomène du dumping social, Elisabeth Morin-Chartier invite toutefois les citoyens européens ainsi que leurs dirigeants à ne pas renoncer à un des principes fondateurs de l’UE – autant pour des raisons économiques que de solidarité entre Etats Membres.
La liberté de circulation des travailleurs dans l’UE mettrait-elle en péril l’existence des différents régimes de sécurité sociale ? Portée par différents mouvements eurosceptiques, cette idée reçue est mise à mal par une note récente de la Fondation Robert Schuman. Son auteur, l’eurodéputée chrétienne-démocrate Elizabeth Morin-Chartier est actuellement rapporteuse au Parlement Européen sur la révision de la directive des travailleurs détachés. Dans cette note, elle insiste sur le fait qu’il existe dans le droit communautaire comme dans les différentes législations nationales de nombreuses dispositions permettant de limiter le « tourisme social ». Sans minorer l’existence de fraudes pour contourner les normes en vigueur, différents arrêts rendus par la Cour de justice de l’Union européenne (Dano 2014 et Alimanovic 2015) confirment qu’un citoyen installé dans un autre Etat membre que le sien ne peut pas prétendre automatiquement au versement de prestations sociales sans se justifier au préalable d’une activité exercée pendant au moins un an dans le pays d’accueil. Au demeurant, depuis 2004 et l’entrée en vigueur de la directive « Citoyens de l’Union », les règles sont clairement établies : pour rester plus de trois mois dans un pays membre autre que le sien, il faut disposer d’un contrat de travail ou de ressources suffisantes pour ne pas devenir une charge pour le système de protection sociale du pays.
L’eurodéputée plaide pour que ces différentes normes soient intégrées au règlement de coordination des régimes de sécurité sociale « afin que le droit européen soit l’outil de protection de nos systèmes de sécurité sociale ». Concernant le travail détaché, l’eurodéputée défend la révision de la directive telle que présentée en mars 2016 par la Commission européenne. Pour rappel, l’exécutif européen défend le principe du « à travail égal/salaire égal » tout en maintenant le principe que les cotisations sociales des travailleurs détachés doivent être versées dans leur pays d’origine. Contesté par plusieurs Etats membres et les confédérations syndicales, le versement des cotisations sociales dans le pays d’origine est défendu ici en raison du caractère « le plus souvent temporaire » de l’activité d’un travailleur détaché.
Des efforts doivent toutefois être menés, selon l’eurodéputée, pour une concurrence plus saine et loyale entre Etats membres. Un système unifié de sécurité sociale européenne n’étant pas à l’ordre du jour, en dépit des promesses d’harmonisation figurant dans différents traités, il convient « de manière pratique » de mieux organiser la mobilité des travailleurs.
Sans une lutte volontaire contre la fraude et des règles plus harmonieuses en termes de concurrence, l’eurodéputée indique « qu’il n’y aura pas de changement radical du regard que les Européens portent sur leurs concitoyens établis dans un autre pays et sur l’Union européenne en générale ».
L’Ipse, lors de sa 44ème Rencontre qui se tiendra à Edimbourg les 30 août et 1er septembre 2017, et qui aura pour thème principal « L’Europe Autrement, de nouveaux espaces pour la protection sociale » et plus particulièrement dans la session intitulée : « Les nouveaux espaces du travail, l’adaptation de la protection sociale confrontée à la quatrième révolution industrielle », entend bien rappeler que l’Europe se doit d’être sociale plus que jamais.