Mardi 30 Mai, la Commission européenne a une nouvelle fois échoué dans sa tentative de proposer une liste de critères permettant de définir un perturbateur endocrinien. Soumise à l’examen des Etats membres, la proposition de l’exécutif européen a été largement rejetée pour des motivations diverses. Plusieurs Etats siégeant au Comité permanent de la chaine alimentaire et de la sécurité alimentaire[1], dont la France, ont jugé que le texte de la Commission manquait d’ambition. Depuis sa première proposition législative présentée en juin 2016, c’est la huitième fois que la Commission échoue à proposer une définition de ces substances chimiques qui peuvent dangereusement interférer avec le système hormonal de l’ensemble des espèces vivantes. « Une saga ridicule » pour de nombreux observateurs qualifiés du dossier et qui retarde toute possibilité de législation à moyen terme.
Sensée être décisive, la récente réunion entre la Commission et les experts européens du Comité permanent de la chaîne et de la sécurité alimentaire s’est à nouveau soldée par un échec. Les propositions présentées par la Commission pour proposer une définition aboutie des perturbateurs endocriniens n’ont pas convaincu la majorité qualifiée des membres du Comité. Le niveau de preuves pour démontrer la nocivité de ces substances par l’exécutif européen apparaît pour beaucoup d’entre eux comme trop élevé. Pourtant, sans une définition claire des perturbateurs endocriniens, il est impossible à l’Europe de légiférer en la matière et de bannir du marché commun des molécules potentiellement dangereuses pour la santé humaine.
Ce nouvel échec n’entame toutefois pas la volonté de la Commission de parvenir à un accord d’ici « les vacances d’été ». Cet optimisme est loin d’être partagé par les ONG de défense de l’environnement. Celles-ci redoutent en effet l’absence d’un compromis entre Etats membres sur la question des seuils de dangerosité des perturbateurs endocriniens. Plus que les critères établis par la Commission, c’est sur le volet des dérogations susceptibles accordées à certaines substances actives que des tensions demeurent entre européens. Pour Hans Muilerman, coordinateur de l’ONG bruxelloise Pesticide Action Network, « les pays de l’Europe de l’Est, ainsi que l’Espagne craignent que les agriculteurs ne s’en sortent pas sans pesticides ».
Sur la question des perturbateurs endocriniens, la Commission européenne aura régulièrement fait montre d’un manque de réactivité. Devant initialement se saisir du dossier en décembre 2013, elle aura attendu deux ans avant de présenter son projet, suite aux pressions du Parlement européen et après une condamnation de la Cour de la Justice Européenne. Son manque de volonté à établir un schéma contraignant fait également craindre que l’intensif travail de lobbying de l’industrie pétrochimique n’ait jusqu’ici porté ses fruits.
Devant la multiplicité des études démontrant la nocivité des perturbateurs endocriniens, la Commission européenne fera-t-elle le pari de l’audace ? Dit-elle encore user du fallacieux prétexte du manque d’études faisant autorité au risque de voir croitre un risque sanitaire de grande ampleur ?
[1]Institué par le Parlement européen et le Conseil en janvier 2002, il assiste la Commission dans l’élaboration des normes concernant la sécurité alimentaire. Il fut créé suite au scandale de la vache folle.